Comment les espions de la NSA ont abusé de leurs pouvoirs pour espionner leurs copines et amants

Le rôle de la National Security Agency américaine est censé être de traquer les terroristes. Mais il s’avère que les espions de l’agence ont à plusieurs reprises abusé de leurs pouvoirs de surveillance pour écouter secrètement les conversations de leurs proches.

Les détails de ces écoutes illégales ont été révélés dans une lettre envoyée par l’inspecteur général de la NSA au sénateur Charles Grassley, R-Iowa. M. Grassley avait demandé des précisions sur les abus de pouvoir intentionnels de la NSA, après que des représentants du gouvernement eurent reconnu en août qu’il y avait eu « quelques » violations délibérées au cours de la dernière décennie.

Il a été rapporté que certains de ces cas concernaient l’espionnage de partenaires ou de conjoints, connu en interne sous le nom de « LOVEINT » pour « Love Intelligence » (renseignement sur l’amour).

La lettre envoyée à Grassley révèle qu’il y a eu 12 cas enregistrés d’espions abusant de leurs pouvoirs depuis 2003, plusieurs de ces cas impliquant le LOVINT.

Lettre au sénateur Chuck Grassley, septembre 2013

1. En 2011, une employée de la NSA travaillant dans une base à l’étranger a espionné les appels de son copain étranger et d’autres étrangers qu’elle rencontrait socialement parce qu’elle voulait savoir s’ils étaient des « personnages louches. »
2. En 2004, une espionne de la NSA a surveillé les appels d’un numéro étranger qu’elle a trouvé dans le téléphone portable de son mari parce qu’elle le soupçonnait d’avoir été infidèle.
3. En 2003, un employé de la NSA a fait l’objet d’une enquête interne après qu’une femme avec laquelle il avait une relation sexuelle l’a dénoncé au gouvernement parce qu’elle soupçonnait qu’il surveillait ses appels. L’enquête a révélé qu’au cours d’une période de cinq ans, l’employé avait illégalement surveillé neuf numéros de téléphone associés à des ressortissantes étrangères. Dans chacun de ces trois cas, il n’y a pas eu de poursuites ni de mesures disciplinaires parce que le personnel de la NSA impliqué dans les abus a démissionné.

Au moins six autres cas similaires de LOVEINT ont été enregistrés par la NSA

1. Un espion a introduit 6 adresses email utilisées par une ex-copine américaine dans un système de surveillance dès le premier jour où il y a eu accès. Il a par la suite affirmé qu’il avait agi ainsi parce qu’il « voulait s’entraîner » à utiliser la technologie d’espionnage.
2. Un autre espion de la NSA a surveillé les appels téléphoniques de sa petite amie étrangère pendant un mois, affirmant qu’il voulait découvrir si elle avait des relations avec des représentants du gouvernement local ou toute autre activité susceptible de lui causer des ennuis.

La pire sanction infligée dans ces affaires a été une réduction de salaire pendant deux mois, un abaissement de grade et la révocation de l’accès à des informations classifiées. Le département de la justice a été saisi d’un cas de LOVEINT en 2011, mais il a refusé d’engager des poursuites. La lettre de l’inspecteur général indique que 2 enquêtes ont également été menées sur des allégations d’utilisation abusive des systèmes d’espionnage de la NSA, et qu’une allégation est examinée en vue d’une éventuelle enquête.

Il est à noter que plusieurs violations n’ont été identifiées qu’après que des aveux d’espions à la conscience coupable ou après qu’ils aient échoué à un test détecteur de mensonges. Il est fort probable que de nombreux incidents similaires passent inaperçus, notamment en raison de l’ampleur des opérations de surveillance de la NSA.

L’agence intercepterait chaque jour 2 milliard de communications (source), et il est certainement difficile, voire impossible, de garder un œil sur chacune d’entre elles.

La publication d’informations sur les cas connus de LOVEINT est significative

Elle confirme sans l’ombre d’un doute que le chef de la NSA, que ce soit par incompétence ou par complicité, fait des fausses déclarations lorsqu’il affirmet que « personne n’a volontairement ou sciemment désobéi à la loi ou essayé d’envahir vos libertés civiles ou votre vie privée ».

Baptisé LOVEINT (un jeu de mots sur « Love-Intelligence »), un certain nombre d’agents à travers le monde ont donc été surpris en train d’espionner leurs intérêts amoureux à l’aide des outils d’espionnage divins de la NSA.

En 2020, un employé de NSO GROUP, une société de surveillance tristement célèbre, a été surpris en train d’essayer de faire exactement la même chose. NSO Group est la société de surveillance israélienne dont la technologie de piratage aurait été utilisée sur les téléphones des associés du journaliste assassiné Jamal Khashoggi.